Éric Mauffrey : « En France, on a un très beau Championnat… »

Comme tout le monde Éric Mauffrey a vécu une saison particulière avec le titre du Trophée Michelin au bout. Il revient avec nous sur sa saison, ses ambitions pour 2021 et sur son « énorme » carrière qui on l’espère durera encore quelques saisons pour notre plus grand plaisir. Rencontre avec Éric Mauffrey !

Bonjour Éric, ce fut une saison particulière pour tout le monde, comment l’as-tu vécue ?

Éric Mauffrey : Un peu comme tout le monde, on traverse une crise qui touche tous les domaines, alors le rallye ne reste que du sport et ce n’est pas une partie essentielle de ma vie. Je roule avant tout pour le plaisir, j’ai été vraiment perturbé dans mon travail lors du premier confinement ou tout fut arrêté. En ce qui concerne le second, la vie a repris le dessus, donc ça s’est mieux passé.

En ce qui concerne le rallye, ça a été une longue attente pour remonter dans les voitures. Toutes les épreuves s’écroulaient les unes après les autres aussi j’ai opté pour le Rallye de la « Montagne noire » puis j’ai rebondi au « Gap Racing ». Les régionaux ne sont pas trop dans mon style de programme mais avec Kevinnous avions envie de remonter dans la voiture donc il a fallu trouver des solutions. En fait il y a eu le Touquet puis rien jusqu’en Août avec le Mt-Blanc, le Cœur de France, le Centre Alsace et la Luronne, ça fait peu. On a tout mis en œuvre pour rouler le plus possible afin de retrouver de bonnes sensations.

D’ailleurs en parlant de rallye, on te voir beaucoup rouler en France, t’exporter ça ne te ferait pas envie ?

Éric Mauffrey : C’est marrant j’allais rajouter qu’en fait avec Kévin nous avions discuté à l’idée de prendre une licence internationale pour 2021 qui serait une solution. L’idée, ce serait de rouler là où ça roule ! Mais bon je t’avoue quand même que j’aime bien le Championnat de France. On a un très beau Championnat, j’adore chaque rallye car ils ont chacun une spécificité. Puis enfin je connais super bien les spéciales et moi ça m’évite de bosser sur des caméras et de travailler comme cela.  

Éric Mauffrey - Skoda Fabia Evo
Éric Mauffrey – Kévin Bronner – Skoda Fabia Evo

En parlant de 2021, tu repars avec la Skoda ?

Éric Mauffrey : Oui je repas avec la Skoda Fabia Evo car elle me satisfait. J’ai bien regardé l’ERC et je pense sincèrement que toutes les R5, en terme de performance, sont dans un mouchoir. La différence c’est que chez Skoda ils sont à l’écoute et ils sont passionnés, puis ils ont travaillé sur l’Evo. Il y aura des améliorations et je suis certain que chez les tchèques tous les clients ont les mêmes pièces, en fait c’est une histoire de confiance.

On l’a compris tu vas favoriser le Championnat de France, une Coupe de France ça ne te motiverait pas ?

Éric Mauffrey : Ah oui la Coupe de France j’aime beaucoup. Pour être honnête j’ai « merdé » en 2018 mais cela dit le niveau est en train de monter. Ça roule très vite et le niveau est très élevé avec l’année dernière une bagarre énorme entre David Salanon et Jean Michel Da Cuhna.

D’ailleurs qu’est ce qui fait encore courir Éric Mauffrey en rallye ?

Éric Mauffrey : C’est le plaisir de conduire et d’être un compétiteur car j’aime bien me bagarrer. J’essaye de tirer mon épingle du jeu et quand je monte dans la voiture je suis comme un gamin. Tu sais à côté je fais du Hockey et les entraînements le soir tard parfois il faut se motiver alors que de monter dans une voiture de rallye je ne me force pas c’est la grande différence.

Éric Mauffrey - Skoda Fabia Evo
Éric Mauffrey – Kévin Bronner – Skoda Fabia Evo

C’est une question pas facile, quel est ton rallye préféré ?

Éric Mauffrey : Ça dépend, il y a beaucoup de rallyes que j’aime pour des raisons différentes. Par exemple le cœur de France pour son tracé. Le mont blanc je l’aime car je le connais bien puis c’est autour de Morzine et de la haute Savoie, je suis attaché à cette région. Mais tu vois je suis déçu du mont blanc il a perdu son attrait par sa technicité au fil du temps. Les premiers monts blancs il y avait des routes déformées, les spéciales étaient techniques maintenant c’est du billard. C’est concentré autour de Morzine et ça a perdu son charme. C’est comme le Lyon Charbonnières j’aime les spéciales mais pas Lyon c’est grand tu as beaucoup de circulation et tu te dis qu’est-ce que je fais là. J’aime bien aussi les Cévennes pour sa spécificité ou le Touquet qui est unique.

Si tu devais garder une voiture laquelle serait elle ?

Éric Mauffrey : La Sierra Cosworth GrA en version 2 roues motrices c’était brutal, c’était des voitures d’homme. Mais maintenant c’est un véritable plaisir de rouler avec les voitures modernes. Alors oui elles ont plus ce côté physique et brutal qu’avaient les voitures des années 90 mais c’est plus efficace. Si je devais résumer et si on parlait de gastronomie on peut dire que la Sierra c’était un Cassoulet et que la Skoda c’est un plat plus fin, plus raffiné…

Quel serait ton meilleur souvenir ?

Éric Mauffrey :  J’ai vécu tellement de choses que c’est dur d’en sortir un. Certainement mon premier contrat officiel chez Renault c’était un souvenir fort avec Patrick Landon (Directeur sportif Renault sport) car devenir pilote officiel était un objectif pour moi, mais je ne suis pas trop du style à regarder dans les rétroviseurs, j’aime bien avancer.  

As-tu un regret sur ta carrière ?

Éric Mauffrey :  Comme tout pilote j’ai de l’égo et même si j’ai eu de belles opportunités, je n’ai été pilote usine qu’une saison avec une voiture « compétition client ». Mon regret c’est de n’avoir jamais eu d’auto capable de gagner au bon moment. C’est comme en 1993, je suis le troisième ou quatrième meilleur performer (scratch en spéciales) du championnat avec seulement 3 courses disputées, mais je ne me bats pas à armes égales face à Béguin par exemple, en fait je n’ai pas eu ma chance. J’ai le regret de ne pas avoir eu l’opportunité de rouler avec la voiture officielle d’un constructeur, car dans les années 90 je suis certain que j’avais le potentiel pour exploser.

Éric Mauffrey - Skoda Fabia Evo
Éric Mauffrey – Kévin Bronner – Skoda Fabia Evo

Comment juges-tu l’évolution des rallyes ?

Éric Mauffrey :  Positif : le format est bien mais c’est un jugement subjectif ! Tu arrives le Mardi, tu reconnais en comptant le Mercredi. Le jeudi il y a le shakedown et les autres jours tu as la course et le Dimanche soir tu es chez toi. Les reconnaissances se sont calmées, tu es plus calme tu ne fais que deux passages et c’est une bonne évolution même si on a perdu un peu de convivialité avec ces formats plus réduits qui nous obligent à courir contre le temps c’est un peu dommage. Après je trouve que pour réussir à percer c’est plus dur de nos jours. A mon époque il y avait sept ou huit pilotes officiels rien qu’en France, ça n’existe plus il n’y a plus qu’une ou deux places. Et puis maintenant et dans très peu de temps, les pilotes paieront pour rouler dans des voitures officielles. Les jeunes sont dans une situation difficile. Ce n’est pas un jugement, regardes Stéphane Lefebvre, quel gâchis !  Citroën a très mal géré sa carrière, quel avenir a-t-il maintenant ? C’est pareil pour les autres jeunes, ils font une saison et derrière il y a quoi ?

Un mot sur les WRC en Championnat de France, c’est un gros débat, tu [Eric Mauffrey] en penses quoi ?

Éric Mauffrey :  Je ne suis pas pour les éliminer. Tout le monde peut rouler avec ce qu’il veut, du moment que les règles pour marquer des points sont claires. Mais moi ça ne me choque pas qu’une WRC+ vienne sur le Championnat si elle ne marque pas de point. Après c’est certain si tu finis second tu ne gagnes pas le rallye, mais moi j’ai l’optique du Championnat et c’est d’ailleurs pour cela qu’il y a de plus en plus de discussions pour engager ces voitures sur des rallyes de doublure. De toute façon, on a un beau Championnat, avec des bons jeunes, de belles voitures, si les règles sont claires voir des WRC c’est bien aussi.  

Tous les pilotes dans leur carrière ont un meilleur concurrent, pour toi qui restera celui qui t’aura donné le plus de fil à retordre ?

Éric Mauffrey :  Patrick Rouillard, c’est le côté sympa du Trophée Michelin ou depuis 2005, 2006 on se tire la bourre à coup de secondes. On se suit depuis pas mal de saisons maintenant, mais à chaque époque il y a toujours un pilote avec qui tu te retrouves en bagarre.

Beaucoup de monde nous pose la question, tu as eu une longue collaboration avec François Delecour et tu dois avoir beaucoup d’anecdotes sur votre collaboration, tu as dû vivre des moments magiques avec lui !

Éric Mauffrey :  Oh oui mais le coup le plus mémorable c’était en fait un grand jeu entre nous. Durant les reconnaissances de nuit il se cachait et dès que je passais il démarrait tous feux éteints et se mettait dans mon coffre et me suivait, et le temps que je me rende compte de ça… il était là depuis un sacré moment. Puis il y a fatalement l’histoire des turbos de Toyota. Quand ça s’est su (au rallye de Catalogne) François est rentré à l’hôtel il était fou de rage, il voulait casser la gueule à Kankkunen qui se trouvait au bar, on a dû le retenir , il était dans une rage folle. Il est comme ça François, il est entier. 

Crédit Photos : Bastien Roux Photographie

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